Cher
Père Noël,
Voilà
des décennies que je vous admire. Depuis le temps, permettez-moi de vous tutoyer et de vous appeler
papa.
Papa,
je ne t’écris pas pour solliciter tes largesses par une demande de cadeau, mais
bien pour obtenir humblement les éclaircissements qui, je l’espère, me feront
mieux comprendre qui tu es et comment tu peux être partout à la fois.
L’autre jour,
à Curitiba, je passais en voiture par un quartier tranquille et calme
de petites maisons basses, quand mon regard est attiré par une silhouette rouge
quelque peu masquée derrière des plantes et une vieille barrière.
Je
m’approche.
Je
vois alors un traîneau rouge attelé de deux rennes tellement figés de surprise
qu’on les croirait de plastique. Il s’agit sans aucun doute de ton attelage, Papa
Noël, ici au Brésil, à quelques jours de l’été au milieu de décembre.
Quelle surprise ! Mais je
ne te vois pas. Peut-être as-tu besoin d’aide dans ce pays étranger. Ma curiosité est piquée au vif.
Je décide alors de mener l’enquête et de retrouver ta trace.
Une
vénérable dame m’affirme avoir vu un homme à barbe blanche, vêtu de rouge errer
au milieu de la végétation subtropicale. Je cherche encore. Toi, un homme du nord de l’hémisphère nord et plus à l’aise dans le froid - houppelande oblige - que sous les tropiques, tu dois étouffer avec ces habits d’hiver.
Le
postier qui passe par là me dit alors t’avoir remarqué - quelle surprise - et même photographié
dans un jardin alors que tu parlais avec une namoradeira, ces personnages traditionnels qui souhaitent la bienvenue
devant les maisons brésiliennes.
Tu semblais, dit-il, de fort bonne humeur bien qu'avec un léger coup de soleil aux joues. L’image que me montre le préposé au courrier apaise un peu mes inquiétudes.
Le
lendemain, par un beau soleil de fin de printemps, je te vois soudain passer !
J’étais persuadé que tu ne te déplaçais que par la traction renneuse, et voilà que tu conduis un rutilant
cabriolet.
Quelle résilience, quelle pouvoir d’adaptation! Et tu as l’air si heureux, tellement à ton aise.
Quelque chose cependant retient mon
attention. A l’arrière de ta voiture on distingue deux écussons : à gauche un drapeau Suisse, et à droite celui du canton de Lucerne.
Ach so ! Tu n’es donc pas lapon mais bien suisse-allemand. Ah les mystères de Noël !
J’essaye
de te rejoindre pour te poser mille questions mais le trafic urbain t'absorbe et me fait
perdre ta trace. J’erre dans toute la ville, en vain.
Je
sais ta tâche incommensurable et dans un territoire immense. Je me résigne
donc.
Un de mes indicateurs confirme qu’il t’a vu en plein travail, et parfois même
mettant à l’épreuve tes qualités d’alpiniste helvétique.
Finalement
un policier témoigne qu’à la nuit tu as rejoint tes rennes où j’ai vu ton
attelage pour la première fois. Rassuré, je sais maintenant que tu es reparti vers un climat plus nordique.
Permets-moi, cher Papa Noël, quelques questions qui taraudent mon esprit curieux :
- Comment arrives-tu à remplir ton cahier des charges international ?
- Quelle est ton alimentation pour supporter cet incroyable stress de fin d’année, ces changements de température et cet interminable marathon?
Et
finalement, et ce n’est pas la plus futile des questions :
- Bon
Dieu, qu’as-tu à voir avec ce Jésus dont on ne cesse de nous parler à la même
époque, mais qui n’apparaît ni sur les cheminées, ni sur les façades, ni dans
les centres commerciaux ?
Dans
l’attente de tes réponses, que je trouverai certainement à côté de mes Havaianas ou de mes Nike d’ici le 25 décembre, je te prie
d’accepter, mon cher Papa Noël, mes salutations les meilleures.
Et si tu passes
de nouveau près de chez moi, viens donc boire un verre. Présente également mes
hommages à tes fidèles rennes, rois des attelages.
Ton
fils, Eric